N°99 (29 juillet 2011)
BEA : DES GROSSES BIZARRERIES... ET DE CRIANTES VERITESLes officiels ont finalement lâché les paramètres (pas tous et sous forme de courbes, alors que les listings, tableaux de chiffres, auraient été préférables pour la précision, notamment pour l'analyse au début des évènements, quand les automatismes se déclenchent). Il faut dire que la pression devenait forte avec tout ce qui a été publié sur le Web et transmis à certaines familles de victimes (relire les derniers messages, notamment les commentaires qui concernent le soit-transmis de la juge Zimmermann et la lettre de François Fillon).
Page 111 du rapport publié ce jour par le BEA, position du manche et position de la gouverne, au temps 2.10.05, au déclenchement des automatismes : on voit le pilote donner des ordres majoritairement à cabrer pendant 20 à 25 secondes... mais la gouverne ne bouge pas. Ensuite, dans les 20 secondes suivantes, on voit deux fois des ordres à piquer pendant des moments assez longs... et la gouverne ne bouge toujours pas. La suite est intéressante à analyser, jusqu'à la fin, où on voit le PHR partir en butée à cabrer et y rester, alors que les pilotes dans la période finale demandent par moment des ordres à piquer au maximum, notamment quand c'est l'autre pilote qui prend les commandes. On peut voir que les ordres à piquer des pilotes ne sont jamais vraiment pris en compte par la gouverne (le PHR, n'en parlons même pas, il reste en butée). Ces ordres ne sont pris en compte qu'avec un décalage (dans le temps et, surtout, dans la position de la gouverne qui reste amorphe). Il faut bien suivre la ligne de zéro du graphique de la gouverne, masquée par du texte. On voit un décalage permanent, dans le sens de la catastrophe (dans le sens du décrochage), entre la gouverne et ce que demande le pilote, avec un PHR en butée dans le sens de la catastrophe lui aussi, c'est à dire que la gouverne et le PHR sont en permanence en position de verrouillage de l'avion en situation de décrochage permanent, même si le pilote met du manche à piquer. C'est très net quand l'autre pilote prend les commandes. Le PHR reste en butée et, surtout, la gouverne ne décolle que très difficilement de la butée à cabrer et de peu de valeur, alors que le pilote y va franchement à piquer (il est indiqué à la page 103 du rapport "pendant 15 secondes consécutives").
N'importe quel avion sort du décrochage quand on y va à ce point "à piquer" sur le manche. Mais, là, la gouverne n'a pas suivi. Alors... qui a mis l'avion au décrochage et l'y a maintenu ? Avec des pilotes qui ne disposent plus d'aucune indication valable comme il ressort par ailleurs du rapport, même si ce n'est pas clairement dit, et si c'est même masqué (cf. paragraphe suivant).
L'annexe 1 (à partir de la page 89) est inacceptable dans sa présentation. Il manque le plus important : de quelles informations disposaient les pilotes sur leur planches ? On devine à leurs propos qu'ils n'ont plus grand chose et que tout est faux, avec des contradictions, le tout variant en permanence, mais c'est ici qu'il fallait faire figurer ces informations avec les explications. On ignore ce qu'indiquaient leurs "horizons artificiels" et il semble bien à la lecture des propos échangés qu'ils indiquaient n'importe quoi. Avec plus de détails dans cette annexe, tout le monde aurait compris que les pilotes ne pouvaient rien faire. Même Superman n'aurait rien pu faire. Avec, en plus, des commandes de vol "dans le sac" (cf. paragraphe précédent). Il est intéressant de noter qu'un des pilote dit "
je n'ai plus le contrôle de l'avion là, j'ai plus du tout le contrôle de l'avion", ce qui indique que les commandes de vol ne répondent plus.
On trouve toutefois une information capitale dans cette annexe, pages 92 et 93. On voit qu'au moment du déclenchement du pilote automatique, l'avion part à piquer en descendant de presque 400 pieds en quelques secondes (quatre à six), ce qui est violent, alors que le pilote, après avoir dit "j'ai les commandes" tire le manche pour tenter de s'opposer à cette descente, vainement. Le pilote tire, mais l'avion continue à descendre. Il suffit de lire ce qui est écrit. C'est écrit, il suffit de vouloir le lire. C'est la preuve d'une anomalie dans les commandes de vol. Ce n'est pas fini. Malgré cette mise en descente, une alarme "décrochage" retentit, ce qui est incohérent. A ce moment le pilote dit "qu'est ce que c'est que ça", parce qu'il constate que les commandes ne répondent pas avec, en plus, cette incohérence d'une mise en descente associée à une alarme décrochage incongrue. Déjà, à ce moment, les commandes ne répondent pas au pilote et les informations dont il dispose sont incohérentes, comme le sont les autres informations sur les planches de bord, incluant l'horizon artificiel. Exactement comme pour d'autres événements précédents... qui se sont produits de jour, avec de la visibilité extérieure (Qantas QF72, Air Caraïbe et bien d'autres).
Il y en aurait encore beaucoup à dire. Par exemple en revenant à la page 111 pour le manche et les gouvernes, avec, page 110, les informations d'incidence qui varient du maximum au minimum pendant les trois dernières minutes, pire qu'un yoyo en accéléré, ce qui amène les ordinateurs de commandes de vol à ne plus rien comprendre. C'est quand cette valeur commence à varier et à battre que le PHR part à 13°, avec les conséquences mortelles que l'on sait.
Oui, après les trois sondes Pitot qui givrent et déclenchent la pagaille informatique et après les premières quarante secondes déjà très bizarres s'agissant du fonctionnement des commandes de vol, la cause suivante apparaît d'une manière certaine durant les trois dernières minutes quand on sait que les ordinateurs prennent en compte les valeurs d'incidence, qu'ils jugent prioritaires sur les actions des pilotes, c'est-à-dire que les ordinateurs répondent aux fausses informations d'incidence et non plus aux demandes des pilotes. On peut voir aussi les informations de vitesse (vitesse conventionnelle et vitesse calibrée), à cette même page 111, qui font du hip hop à un rythme olympique. Là aussi, les ordinateurs prennent en compte cette information de manière prioritaire sur les pilotes (la mesure d'incidence agit en protection "basse vitesse", correspondant à de trop fortes incidences, et donne un ordre à piquer que le pilote ne peut contrer, par conception, et la mesure de vitesse agit en protection haute vitesse, et donne un ordre à cabrer que le pilote ne peut contrer, par conception).
Les ordinateurs des commandes de vol pouvaient-ils comprendre quelque chose à cette salade d'informations, avec les deux paramètres essentiels qu'ils jugent prioritaires sur les pilotes, l'incidence et la vitesse, qui dansent dans tous les sens, allant de butée en butée à un rythme fou ? Regardez bien les paramètres qui viennent d'être analysés (manche du pilote, position de la gouverne et du PHR, informations d'incidence et de vitesse). Qui n'a pas compris que les ordinateurs ont été frappés d'embolie générale, tant pour les informations délivrées sur les planches que pour le fonctionnement des commandes de vol ?
Il y en aurait encore beaucoup à dire. Cela viendra peut-être ici, mais est-ce bien utile ? Allez, encore un peu. Revenons au moment crucial, le tout début des évènements. En regardant d'un peu plus près on peut voir beaucoup d'autres choses encore à ce moment capital. Par exemple, dans les quelques secondes
qui précédent le déclenchement des automatismes, on voit que le régime des moteurs diminue fortement (page 111). On voit aussi, et là c'est essentiel, que, toujours à ce moment crucial, l'assiette diminue d'au moins trois degrés,
avant le déclenchement des automatismes (page 114). Trois degrés, ce n'est pas rien à la vitesse de croisière !
L'avion part à piquer avant le déclenchement des automatismes. Ceci est confirmé par la perte d'altide de 400 pieds en quelques secondes qui a été relevée deux paragraphes plus haut, ci-dessus. Ainsi,
il est établi que l'avion est parti à piquer, assez brutalement, avant le déclenchement des automatismes. Faut-il s'étonner que le pilote ait tiré sur le manche pour corriger ? Le problème est que, dans le même temps, le pilote a perdu tous ses repères, parce qu'il n'y avait pas de visibilité extérieure et parce que les informations des planches de bord sont devenues brutalement du "n'importe quoi" à ce moment. Et en plus les lois des commandes de vol ont changé à ce même moment (passage en mode alternate), modifiant complètement la sensibilité de pilotage et la gestion de la trajectoire avec le manche ! Un équipage de la Qantas a vécu cela et
il le raconte par le détail. Les pilotes ont entre autres déclaré qu'heureusement c'était de jour et qu'ils voyaient dehors, mais que, malgré cela, ils n'avaient rien compris, que les ordinateurs leur avaient pris le contrôle de l'avion et que, dans d'autres conditions extérieures, ils ne s'en seraient certainement pas sortis. Et
les pilotes ont engagé un procès contre Airbus. Lisez bien ces deux derniers liens, cela vaut le coup, notamment s'agissant des commandes de vol. Cela rappelle furieusement le Rio-Paris, avec l'avion qui pique sans prévenir, les ordinateurs en conflit avec les pilotes, etc.
Une panne dormante antérieure ? Page 114 on constate que le paramètre de la vitesse verticale sélectée varie de manière régulière entre 0 et -5000,
avant la survenance de la défaillance des sondes Pitot. S'agit-il d'une panne dormante ? Si oui, les effets de celle-ci n'auraient-ils pas pu s'ajouter à ceux des défaillances des sondes Pitot quand celles-ci se sont bouchées ? Il s'agit des effets sur les ordinateurs des commandes de vol et les indications fournies aux pilotes sur les tableaux de bord. On peut faire le même constat, avec les mêmes interrogations, au vu d'autres paramètres.
Les familles et tous ceux qui veulent la vérité n'ont qu'une chose à faire :
demander le fichier des paramètres FDR sous forme numérique (une clé USB ou autre), et mettre ça dans une machine comme celle dont dispose le BEA (voir message N°92 ci-dessus, avec des liens très instructifs sur ces superbes ordinateurs et ce qu'ils permettent). Tout ça est très simple et très rapide. De nombreuses compagnies aériennes disposent d'un tel matériel, certaines en ont même plusieurs modèles. Est-il possible de le refuser aux familles quand on voit dans le rapport du BEA qu'Airbus collabore à l'enquête et que le constructeur dispose donc de ces fichiers ? Il conviendrait aussi de ne pas attendre afin de ne pas prendre le risque qu'une modification des logiciels empêche une reproduction fidèle des faits. Il convient également de demander les paramètres FDR sous forme de listings, les courbes fournies à ce jour étant inexploitables par manque de précision et, de plus, incomplètes (de nombreux paramètres manquent).
Mais il faudra certainement demander aux pouvoirs publics et à la justice ces pièces à conviction majeures avec beaucoup de fermeté, une nouvelle fois. Mais la fermeté paye. Alors...
Update, 30 juillet 2011, 13 heures 30 (Paris). Il en a été question dans des messages précédents, mais il n'est pas inutile d'y revenir. Ce genre de problème n'est pas nouveau, avec les ordinateurs des commandes de vol qui déraillent et prennent la main, en faisant n'importe quoi, sans que le pilote puisse s'y opposer utilement. Des incidents graves ont eu pour origine cette suprématie des ordinateurs parfois fous et de nombreux accidents aussi, avec ou sans victimes. Rappelons notamment
le crash de Perpignan qui en est une belle illustration. La série avait d'ailleurs commencé dès la mise en ligne de cette technologie, avec le crash de Habsheim (
livre).
UPDATE, 31 JUILLET 2011, 10 heures 50 (Paris). RECONSTITUTION JUDICIAIRE.
N'importe quelle partie civile (ce qui vaut pour les associations) peut demander à la juge Zimmermann de procéder à la lecture du fichier de paramètres FDR au moyen du matériel décrit dans le message N°92. Les parties civiles ont un pouvoir de contrôle de ces actes.(oui, le rouge, ça peut énerver, mais il y a beaucoup de gens en France qui regardent au plafond et font semblant de ne rien voir)Article 156 du code de procédure pénale : Toute juridiction d'instruction ou de jugement, dans le cas où se pose une question d'ordre technique, peut, soit à la demande du ministère public, soit d'office, ou à la demande des parties, ordonner une expertise. Le ministère public ou la partie qui demande une expertise peut préciser dans sa demande les questions qu'il voudrait voir poser à l'expert. [...]
Article 165 : Au cours de l'expertise, les parties peuvent demander à la juridiction qui l'a ordonnée qu'il soit prescrit aux experts d'effectuer certaines recherches ou d'entendre toute personne nommément désignée qui serait susceptible de leur fournir des renseignements d'ordre technique.(Code de procédure pénale,
articles 156 et suivants)